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Biographie rapide d'Auguste Letenneur

Né à Roncey en 1832 dans une famille pauvre de paysans, son enfance sera bercée par l'histoire de sa grand-mère maternelle, morte pendue à un croc de boucher dans sa cheminée, un coup des républicains si l’on en croit la légende, mais plus probablement victime des Chouans.

En 1855, âgé de 23 ans, il quitte le village de Roncey, et se livre à divers travaux (terrassement, débardeur, blanchisserie) à Saint-Lô, Bayeux, Caen, et au Havre. C’est à partir de cette dernière ville qu’il commence, en 1857, son activité de marchand ambulant. Il est à Paris en 1859, puis se fixe à Caen.

Il se marie avec Henriette Basourdy en 1860, avec laquelle il a sept enfants. Avec son aide, il poursuit son activité de marchand ambulant dans une quinzaine de départements. Il peut commencer ses premiers achats de terre et faire construire à la Rousserie.

Victime d’un accident, Auguste Letenneur y fut inhumé en 1916.

Ancre 1

Poème d'Auguste Letenneur sur la Rousserie

A la Rousserie

 

Mon cher petit domaine, charmante Rousserie

De longtemps je t’aime, comme tu es jolie

Après beaucoup d’absences et de longs voyages,

Chacun de mes retours je t’aimais davantage.

De cultiver ton sol m’est un bien doux plaisir

Je voudrais t’embellir, y vivre et mourir

Pour moi aucun pays ne m’a paru plus beau

J’ai testé à charge d’y mettre mon tombeau.

 

Ainsi est ma volonté en février 1899.

Auguste Letenneur

Extrait du testament d'Auguste Letenneur

Ancre 2

" Je soussigné, Letenneur Auguste François, négociant à Saint-Lô, résidant assez souvent à ma propriété de la Rousserie à Roncey, ai pris à l’égard de ma sépulture les dispositions ci-après.

Nous avons, Madame Letenneur et moi, réalisé jusqu’ici une fortune relativement importante et cela nous permet de nous assurer pour l’avenir une sépulture et l’entretien d’un caveau de famille à notre convenance.

Aussi en prévision de mon décès, de celui de mon épouse et des autres membres de ma famille ou alliés par le mariage, je vais faire incessamment édifier dans la pièce (de terre) dite de l’école (…) un caveau de famille par moi destiné tout à ma sépulture qu’à celle de ma femme et celle de mes descendants et alliés le cas échéant.

Pour le cas où ce caveau ne serait pas achevé ou même commencé avant ma mort, je déclare que j’entends affecter à son installation une somme de 25 000 francs au maximum sur ma fortune personnelle et l’emploi devra en être fait par mes héritiers sur les plans et sous la surveillance d’un architecte compétent qui en dressera le devis. (…)

La pièce où je désire édifier ce caveau est située à la distance prescrite par les lois.

C’est là que je veux être inhumé.

C’est là aussi que je désire que mon épouse et mes enfants et autres descendants ou alliés, se fassent inhumer eux-mêmes s’ils le veulent et s’ils en manifestent la volonté écrite (…). "

" Respectueux de la liberté individuelle et de toutes les croyances, je veux si tel est mon droit qu’il ne puisse être soulevé aucune objection pour refuser à n’importe lequel de mes héritiers ou descendants le droit de sépulture dans ce champ de repos à raison soit de ses croyances, soit de son culte, soit des circonstances qui auraient accompagné sa mort et ne fait d’exception que pour ceux de ma famille, si malheureusement il s’en trouvait, qui viendrait à être condamnés à une peine afflictive ou infamante. (…)

 

J’impose à mes descendants la charge et le soin d’entretenir ce caveau de famille d’une façon convenable. Je ne doute pas que leur piété filiale et aussi le respect dû aux morts leur fasse un devoir de s’acquitter généreusement et ponctuellement de cette mission que je leur confie.

 

Pour l’entretien et au besoin l’embellissement de ce caveau et du champ, j’affecte à perpétuité la pièce entière du clos de l’école dont les revenus devront chaque année être scrupuleusement, loyalement, et intelligemment employés à cette destination. Et si mes descendants ne veulent ou ne peuvent être inhumés dans ce caveau même de famille que je fais édifier, je les autorise à construire auprès de ce caveau tels autres édifices tumulaires qui leur plaise, à leurs frais, et même se faire enterrer tout simplement. (…)

Je charge les maires successifs de la commune de Roncey de surveiller l’exécution de mes volontés à l’égard de mes droits de sépulture ci-dessus transcrits et de ses suites. Je les prie de veiller avec sollicitude à l’entretien de ce caveau de famille. Ils auront soin d’empêcher qu’il ne se commette dans le lieu de ma sépulture aucun désordre ni aucun acte contraire au respect qui est dû à la mémoire des morts. (…)

Telles sont mes dernières volontés.

Fait, écrit et signé de ma main à Roncey, le 5 avril 1898. "

Mémoires d'Auguste Letenneur

Ancre 3

" Avant-propos : un petit résumé de mes mémoires – prière d’en prendre lecture

Mes enfants,

Votre père est né de parents pauvres, honnêtes, n’ayant jamais mendié. Ils se suffisaient avec beaucoup de privations. Nous étions six et sept enfants à charge. Aussitôt que chacun de nous pouvait gagner sa vie, très jeune, dès l’âge de douze ans, l’on se tirait de la maison pour alléger les grandes charges de nos parents. Journalier, domestique, tisserand, voilà ma jeunesse jusqu’à 22 ans. Une idée qui m’obsédait : je voulais sortir de mon village.

En juin 1855, je partis avec 12 francs en poche. Mon père n’était pas opposé à mon projet : Essaie, me dit-il, soit toujours honnête et de bonne conduite, ce que j’ai fait. Si tu es trop malheureux, reviens, tu gagneras toujours ta vie ici.

Ma première station fut Saint-Lô, puis Bayeux, Caen, Ouistreham. Tous travaux divers étaient acceptés par moi : à la campagne, aux travaux de terrassement du canal de Ouistreham, puis je pris le bateau pour Le Havre. Là, j’étais malheureux travailleur au port, embarquement et débarquement, et un temps aux fortifications du Havre. Pendantprès de deux à trois mois dans une blanchisserie de toiles, puis retour au Havre où je me plaisais assez bien. Mais l’hiver, peu de travail. Je me suis fait marchand ambulant, non vulgaire camelot. Là, ce fut une heureuse et grande idée. Je me trouvais dans mon élément. J’étais très heureux, tout en travaillant avec ardeur. L’aisance vint rapidement.

 

1859 – 1860 : un mois d’août, je me suis marié, moi et votre mère. J’avais bien peu de valeurs, mille francs environ.

 

1861 : Peu de succès. Notre premier enfant, Berthe. Nous avons redoublé d’énergie tous les deux : ça marchait faiblement, n’ayant pas assez de connaissances, ni aucun secours.

 

1863 : nous avions fait un peu de progrès, l’on travaillait avec ardeur.

 

1864 : deux enfants, Albert.

 

1866 : trois enfants.

 

1868 : quatre enfants.

 

1870 : cinq enfants.

L’ensemble allait bien, les affaires pendant cinq ou six ans avaient mis une certaine aisance malgré les mois d’avarie.

J’étais enchanté, nous faisions des projets d’avenir qui promettaient. Je faisais construire à la Rousserie pour se loger. J’achetais des petits lopins de terre. Nous parcourions environ quinze départements par [année] normale, Normandie, Bretagne, Le Maine, La Vendée, etc… quand la guerre de 1870 nous fit un arrêt forcé. Nous avons resté pendant tout l’hiver 1870 – 1871 en déballage à Saint-Lô. Depuis cette époque, nous avons pris domicile en location, tout en voyageant par chemin de fer et voiture à l’occasion.

 

1875 : six enfants.

 

Nous avons fait l’acquisition d’un immeuble place des Beaux-Regards vers 1878, et peu à peu nous avons fait restaurer notre magasin. Nos enfants grandissaient. Tout en leur donnant l’éducation nécessaire, on les faisait travailler à la fois. Notre magasin prenait de l’extension. Je mariais ma fille aînée, puis Albert faisait son service militaire, puis je marie ma seconde fille.

Pendant la période 1880 – 1881, j’ai perdu deux enfants, Aristide et Céline, perte pénible : l’un avait treize et l’autre huit ans.

En 1892, j’ai fait une convention en société collective avec mon fils Albert qui me parut actif et apte au commerce. Jusqu’aujourd’hui 1905, ça marche assez bien. "

" J’ai habité comme suit et les environs

1855 : en juin, départ de Roncey pour Saint-Lô, Bayeux. Hiver : le Havre comme débardeur, terrassier et brasseur de pommes.

1856 : printemps, été, automne : Le Havre, terrassier. Hiver mauvais. Rendu à Lisieux dans une blanchisserie de toiles chez les Montier.

1857 : retourné au Havre, au printemps. L’été et l’automne, terrassier. Fin novembre : début de marchand ambulant avec balle (son cheval).

1858 : hiver : voyageant du Havre, Rouen, Lisieux, Caen, où je me suis fixé en mars, voyageant avec balle et la petite voiture à bras aux environs, toute l’année.

1859 : en janvier, départ pour Paris avec ma petite voiture à bras tout le long de la route, de ville en ville et village en village. Arrivé à fin février à Paris. Habité jusqu’au 10 avril. Avait reçu avis de la mort de mon père et de ma mère en trois jours de date. Reviens aussitôt par le chemin de fer, voiture et marchandises, à Caen, et, le lendemain me rend à Roncey où mes frères et sÅ“urs m’attendaient impatiemment. Une quinzaine de jours seulement où nous avons fait nos lots un petit héritage de nos parents et retourné à Caen où j’ai fait mon commerce de marchand et les environs.

En juin, fait connaissance de mon épouse à la foire de Formigny. Toute l’année s’est passée dans les environs de Caen, Bayeux, Coutances, Saint-Lô et les environs, toujours en rapport par voix parlée avec mon épouse qui était jeune fille de 17 ans.

1860 : voyageais avec un petit cheval et voiture. Toujours en relation avec ma future épouse. Tergiversations diverses avec ses parents. Enfin nous nous sommes mariés le 28 août et nous avons continué notre commerce avantageusement de cette époque jusqu’à l’hiver 1870 – 1871.

Pendant cette période, nous avons presque toujours été en voyage en exploitant une quinzaine de départements en travaillant avec ardeur.

Cinq enfants sont nés pendant cette période, et deux enfants ensuite, en tout sept. Nos affaires n’en allaient pas plus mal, quand la guerre de 1870 nous fit changer notre manière d’agir. Nous nous sommes installés à Saint-Lô, tout en voyageant par le chemin de fer. Dépôt à Coutances et à Carentan pendant une douzaine d’années. Coutances a été cédé à mon gendre Piquot et ma fille Berthe. J’ai installé également mon gendre Bazin et ma fille Héloïse à Vire. Nous avons, en 1894, associé mon fils Albert et sa femme ainsi que mon fils Georges à sa majorité.
Enfin, 1855 â€“ 1857 – 1860 – 1870 – 1894 sont des années mémorables pour nous, comme date de sublimes années qui marqueront les étapes les plus importantes de ma vie jusqu’à ce jour.

La Rousserie, le 5 novembre 1897

Auguste Letenneur "

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